AFSC : d’énormes pouvoir et pas de contrôles

Depuis l’an 2000, au moins 13 personnes migrantes sont mortes en détention. Les migrant.e.s sont les seules personnes au Canada qui peuvent être détenues administrativement pour de longues périodes, ou indéfiniment, sans accusation ou condamnation.

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Dominique Peschard, membre du CA
Ligue des droits et libertés

Le décès, à une semaine d’intervalle en mars 2016, de Francisco Javier Romero Astorga et de Melkiore Gahundu, alors qu’ils étaient maintenus en détention par les services canadiens d’immigration, a relancé le débat sur le manque de mécanisme de surveillance de ces agences. L’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), responsable de la détention de M. Astorga, un chilien de 39 ans père de quatre enfants, a refusé d’expliquer comment il était décédé. La famille de M. Astorga a été très peu informée des faits, outre qu’elle devrait débourser 10 000 $ pour rapatrier le corps. M. Gahungu, un réfugié Burundais de 64 ans en attente de déportation, s’est pendu dans le Toronto East Detention Center. L’ASFC a refusé de divulguer de l’information entourant son décès. Depuis l’an 2000, au moins 12 autres personnes sont mortes en détention.

Les migrant-e-s sont les seules personnes au Canada qui peuvent être détenus administrativement pour de longues périodes, ou indéfiniment, sans accusation ou condamnation. En 2013, dernière année pour laquelle des données officielles sont disponibles, 7 300 personnes étaient en détention. La vaste majorité, soit 94%, sont détenues pour des motifs autres qu’une menace à la sécurité, comme par exemple, des problèmes de vérification d’identité. Un tiers sont détenues dans des prisons provinciales avec des criminel-le-s de droit commun. Cette détention représente un traumatisme supplémentaire pour des réfugié-e-s qui ont dû surmonter d’autres épreuves.

Le Comité des droits de l’homme des Nations Unies s’est dit préoccupé que les migrant-e-s ou les demandeuses et demandeurs d’asile dont l’arrivée est désignée « irrégulière » puissent être placés en rétention obligatoire et ne bénéficient pas des mêmes droits que ceux qui seraient arrivés de manière « régulière ». Le comité a demandé au Canada de s’abstenir de placer en rétention pendant une période indéterminée les migrant-e-s en situation « irrégulière » et de faire de la rétention une mesure de dernier recours[1].

L’ASFC exerce ses responsabilités en vertu des lois canadiennes en matière de douane et d’immigration. Ses agent-e-s ont les pouvoirs d’un corps policier d’interroger, arrêter, détenir, fouiller et saisir. Leurs pouvoirs dépassent mêmes ceux de la police dans la mesure où elles et ils peuvent les exercer à l’égard des voyageuses et voyageurs sans mandat judiciaire. Plusieurs cas ont été rapportés où l’ASFC a contacté les autorités du pays de la demandeuse ou du demandeur d’asile ou les membres de sa famille et ses ami-e-s dans le pays d’origine, mettant ces derniers en danger[2].

Il est inconcevable qu’une agence comme l’ASFC, qui détient autant de pouvoirs sur des personnes vulnérables, puisse exercer ces pouvoirs sans mécanisme d’examen extérieur et indépendant. La mort de Javier Romero Astorga et Melkiore Gahundu a relancé la demande pour un tel mécanisme.

Bibliographie

[1]      Observations finales concernant le sixième rapport périodique du Canada, Comité des droits de l’homme, 20 juillet 2015

[2]      https://bccla.org/wp-content/uploads/2014/03/20140305-CBSA-accountability-release-backgrounder.pdf

 

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