Nouvelle
Jugement de la Cour d’appel sur les interceptions routières sans motif
Montréal, le 24 octobre 2024 – La Ligue des droits et libertés (LDL) salue le jugement de la Cour d’appel qui confirme le jugement Luamba de première instance relatif aux interceptions routières sans motif, une pratique qui est une source de profilage racial. La Cour d’appel ne laisse planer aucun doute quant au fait que l’article 636 du Code de la sécurité routière (CSR) du Québec, qui permet les interceptions routières sans motif requis « viole les droits garantis par les articles 9 et 15 de la Charte canadienne des droits et libertés sans pouvoir être justifié dans le cadre d’une société libre et démocratique, et qu’il est de ce fait invalide » (par. 868).
La LDL considère que le gouvernement du Québec, en tant que législateur, doit abroger l’article 636 du CSR rapidement, avant le délai de 6 mois prescrit par la Cour d’appel, afin de mettre fin immédiatement à cette source de profilage racial des automobilistes noir-e-s et racisé-e-s au Québec.
La LDL tient à saluer et à remercier M. Joseph-Christopher Luamba et son avocat, Me Mike Siméon, d’avoir poursuivi cette lutte devant la Cour d’appel ainsi que le travail des avocat-e-s de l’Association canadienne des libertés civiles, Me Bruce Johnston, Me Lex Gill et Me Louis-Alexandre Hébert-Gosselin. Elles saluent aussi le travail des organisations intervenantes dans le dossier.
Enfin, la LDL souligne le courage de toutes les personnes qui ont témoigné lors des audiences sur les conséquences du profilage racial qu’elles ont subi.
La LDL rappelle qu’elle poursuit ses interventions pour mettre fin à toutes les pratiques de profilage racial au Québec. Parmi les nombreuses actions qu’elle somme les autorités d’entreprendre, mentionnons :
- Abroger ou modifier plusieurs règlements municipaux qui sont à la source de profilages racial et social systémiques dans l’espace public;
- Interdire la pratique des interpellations policières (street check), qui sont des contrôles d’identité arbitraires qui portent atteinte aux droits et libertés et une source de profilages racial et social systémique
Consulter la campagne lancée en 2023 pour exiger l’interdiction des interpellations policières.
En savoir plus
L’article 636 du Code de la sécurité routière
Au Québec, l’article 636 du Code de la sécurité routière (CSR) donne aux policiers le pouvoir d’intercepter au hasard les conducteur-trice-s de véhicules routiers pour des raisons relatives à la conduite automobile, comme la validité du permis de conduire et de l’assurance de l’automobiliste, l’état mécanique du véhicule ou la sobriété de l’automobiliste[1]. Contrairement aux conducteur-trice-s, les personnes passagères ne sont pas visées par l’article 636. Lorsqu’un policier intercepte un-e automobiliste, les personnes passagères n’ont pas d’obligation légale de s’identifier en vertu de cette disposition, ni de répondre aux questions du policier.
Interpellations policières
On utilise aussi les expressions street check, contrôle d’identité ou contrôle de routine pour parler d’une interpellation.
Une interpellation est un contrôle d’identité arbitraire. C’est une situation où un policier tente d’obtenir l’identité d’une personne et de recueillir des informations auprès d’elle, alors que la personne n’a aucune obligation légale de s’identifier, ni de répondre aux questions.
Les informations peuvent ensuite être enregistrées par le policier dans une base de données à des fins de renseignements policiers.
L’interpellation a lieu à l’extérieur du contexte d’une enquête policière et ne compte pas parmi les pouvoirs policiers reconnus en matière d’arrestation et de détention. Elle a lieu dans l’espace public et vise généralement les personnes piétonnes ou passagères de véhicule.
Une interpellation est une pratique arbitraire qui porte atteinte aux droits et libertés et est source de profilages racial et social systémique. Elle n’a pas de fondement légal au Québec (loi ou common law), c’est-à-dire que les policiers n’ont pas le pouvoir de faire des interpellations.