Communiqué de presse
Pour diffusion immédiate
Projet de loi no 82 – Loi sur l’identité numérique nationale
Entière transparence et débats sont nécessaires avant d’aller plus loin
Montréal, le 27 janvier 2025 – La Ligue des droits et libertés (LDL) participe mardi, le 28 janvier à 17 h 45 aux auditions publiques et consultations particulières de la Commission des finances sur le projet de loi n° 82 (PL82), Loi concernant l’identité numérique nationale et modifiant d’autres dispositions. Dans son mémoire publié aujourd’hui sur son site Web, la LDL demande un large débat public informé et une entière transparence sur l’ensemble du projet gouvernemental d’identité numérique nationale (INN), incluant le portefeuille numérique.
L’INN devrait être conçue de manière à garantir la protection des renseignements personnels ce que le PL82 échoue à faire.
Le programme d’INN est en cours depuis au moins 2021. La LDL regrette que l’encadrement légal que propose le PL82 survienne à un stade si avancé du programme d’INN. Le PL82 offre peu de détails sur le fonctionnement technique du système d’identité numérique et semble surtout destiné à pérenniser plusieurs paramètres déjà fixés par décrets et donc, sans débat public.
Plusieurs éléments pourraient mettre à risque des données personnelles sensibles et conduire à des dérives : la banque centralisée de renseignements personnels aux fins de l’INN, propice au piratage ou aux fuites, le recours éventuel à la biométrie et le manque d’encadrement sur le plan de l’interopérabilité.
Le virage numérique gouvernemental risque aussi de compliquer, voire de compromettre l’exercice de nombreux droits économiques et sociaux et l’accès à des prestations, ce qui entraînera une forme d’exclusion numérique et l’exacerbation d’inégalités, aussi appelées fractures numériques. Ce sont les groupes historiquement discriminés (notamment les personnes âgées, en situation de handicap, à faible revenu, peu alphabétisées, autochtones et immigrantes ainsi que les femmes) qui pourraient faire les frais de cette transformation.
La LDL demande en conséquence que les services gouvernementaux restent accessibles en mode traditionnel dans des conditions de concurrence équitables avec les services en ligne.
Il reste encore beaucoup trop d’inconnu dans le projet d’identité numérique nationale, notamment en ce qui concerne le portefeuille numérique. La LDL réclame la tenue d’un véritable débat informé et éclairé sur l’architecture de l’INN, son mode de fonctionnement et de gouvernance, son utilité et son financement, ainsi que ses effets sociaux et sur les droits humains.
Citations
« L’implantation de l’INN n’est pas à prendre à la légère. Elle comporte des risques sérieux pour le droit à la vie privée, le droit à l’égalité et l’accès de toutes les personnes aux différents services publics qui leur permettent d’exercer leurs droits. Non seulement le PL82 ne propose pas aux Québécois-e-s les précautions essentielles dans la foulée du déploiement de l’INN, mais le législateur se garde une marge de manœuvre pour déterminer ultérieurement certaines modalités par décret et donc sans consultations ni débat public » déclare Lynda Khelil, porte-parole de la LDL.
« Le projet d’identité numérique national est déjà en développement sans aucun débat public informé. Il ne rencontre pas les prescriptions de transparence établies par les commissaires à la vie privée de partout au pays » déclare Dominique Peschard, porte-parole de la LDL.
Faits saillants
Selon une étude de l’INRS, un-e Québécois-e sur quatre (25 %) n’utilise pas les services gouvernementaux en ligne. « Sept principaux facteurs de vulnérabilité numérique ressortent de l’analyse des données : l’âge, la situation géographique, le revenu, les compétences numériques, le niveau d’éducation, le fait de vivre seul et le statut d’immigration ». (p. 4)
En 2023, le Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec (RGPAQ) a déployé la campagne Traversons l’écran. Pour un virage numérique humain. Cette campagne alerte sur les conséquences de la transformation numérique des services publics sur les droits de la population québécoise. Elle insiste notamment sur la nécessité de maintenir des services en personne et des alternatives de qualité au tout numérique.
Le PL82 définit l’identité numérique comme « l’ensemble des moyens dont dispose l’État pour garantir à toute personne un accès sécurisé aux prestations électroniques de services gouvernementales ». Il s’agit donc de sécuriser les échanges en ligne des citoyen-ne-s avec l’État. Mais l’identité numérique doit aussi permettre « de réaliser des interactions dans la collectivité » à l’aide d’attestations gouvernementales certifiant certaines informations (identité, âge, adresse, état civil, etc.) sur une application numérique. Ces attestations numériques pourraient donc servir lors de transactions privées (banque, assurances, entreprises, etc.).
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À propos de la Ligue des droits et libertés
Depuis 1963, la Ligue des droits et libertés (LDL) a influencé plusieurs politiques gouvernementales et projets de loi en plus de contribuer à la création d’institutions vouées à la défense et la promotion des droits humains. Elle intervient régulièrement dans l’espace public pour porter des revendications et dénoncer des violations de droits auprès des instances gouvernementales sur la scène locale, nationale ou internationale. Son travail d’analyse, de sensibilisation et de promotion est primordial pour que les droits humains deviennent la voie à suivre vers une société juste et inclusive, pour tous et toutes. Comme organisme sans but lucratif, indépendant et non partisan, la LDL vise à défendre et à promouvoir l’universalité, l’indivisibilité et l’interdépendance des droits reconnus dans la Charte internationale des droits de l’homme.
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