Communiqué de presse
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Lutte aux profilages racial et social
La Ville de Montréal trahit son engagement de réviser ses règlements municipaux
Montréal, le 27 février 2025 — À l’occasion de la fin des auditions de l’Office de consultation publique de Montréal (OCPM) sur la crise de l’itinérance, la Ligue des droits et libertés, le Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM), la Clinique Droits Devant, la Clinique juridique itinérante, le Conseil Québécois LGBT et Stella l’amie de Maimie dénoncent la décision de la mairesse de la Ville de Montréal, Valérie Plante, de cesser subitement la démarche de révision des règlements municipaux sources de profilages social et racial. La mairesse en a informé les organisations dans une lettre transmise le 18 février.
Un long processus
La révision des règlements municipaux est une recommandation issue d’une consultation publique sur la lutte aux profilages social et racial en 2017, que le comité exécutif a entériné en 2018. À la suite de la révision amorcée en 2019, les organisations ont transmis en 2020 leurs analyses et recommandations visant à abroger des dispositions réglementaires sources de profilage. La Ville a attendu jusqu’en mai 2024 pour finalement proposer des modifications réglementaires qui ne répondent pas à ses obligations en matière de droits humains. En septembre 2024, les organisations ont demandé directement à la mairesse d’émettre de véritables propositions à la hauteur des enjeux. En octobre 2024, le directeur général de la Ville, Benoit Dagenais, confirmait que la Ville poursuivait le travail et planifiait une rencontre avec les organisations en 2025, avant que la mairesse annonce l’abandon de cet engagement le 17 février.
Des règlements sources de profilage
Certaines infractions règlementaires problématiques visent directement les comportements ou les stratégies de survie des personnes en situation d’itinérance ou des travailleuses du sexe, comme le « vagabondage », le fait de gêner la circulation des piétons, la présence dans les parcs la nuit ou le fait de dormir sur un banc (mauvaise utilisation du mobilier urbain).
D’autres infractions pénalisent et judiciarisent des enjeux sociaux ou de santé publique avec lesquels ces personnes sont aux prises, comme la consommation de boissons alcooliques ou le fait de « flâner ivre ». De plus, ces infractions réglementaires sont formulées de façon tellement large et générale qu’elles ouvrent la voie à une application policière discrétionnaire, arbitraire et génératrice de profilage.
À quand un véritable leadership dans la lutte contre les profilages racial et social ?
La révision des règlements municipaux devait être un jalon important dans la lutte aux profilages à Montréal. Elle devait permettre de retirer des outils que les policiers utilisent pour judiciariser, surveiller, réprimer, déplacer et harceler. Mettre fin à cette révision est un échec pour la Ville, qui n’a à ce jour réalisé aucune mesure significative pour lutter efficacement contre les profilages racial et social systémiques et le déni de droits qu’ils entraînent.
La décision d’abandonner la révision des règlements municipaux s’ajoute à une série d’actions de plus en plus violentes envers les personnes en situation d’itinérance, tels que les démantèlements de campements, et la priorisation de la répression policière plutôt que le respect des droits humains par l’administration municipale.
Rappelons que la Ville refuse aussi d’implanter un moratoire sur les interpellations policières, une autre source avérée de profilages, malgré la recommandation d’une équipe de chercheur-es indépendant-es en juin 2023 et la campagne demandant l’interdiction de cette pratique arbitraire.
Les organisations demandent à la mairesse de Montréal de revenir sur sa décision et de poursuivre la révision des règlements pour abroger rapidement plusieurs dispositions sources de profilages.
Citations
« Depuis 2019, plusieurs membres du comité exécutif ont répété que l’administration est fermement engagée à réviser ses règlements municipaux sources de profilages racial et social. La mairesse Valérie Plante trahit son engagement et laisse tomber les personnes victimes d’interventions policières discriminatoires » déclare Lynda Khelil, responsable de dossiers politiques à la Ligue des droits et libertés.
« La Ville ne peut en aucun cas justifier son retrait de cette démarche, et plus largement de la lutte aux profilages social et racial, sous prétexte qu’elle met en place d’autres mesures d’aide aux personnes en situation d’itinérance. Les outils de profilage, comme le profilage lui-même, font partie du problème et il est impératif que la Ville s’y attaque » déclare Annie Savage, directrice du RAPSIM.
« Vous est-il déjà arrivé de recevoir une contravention parce que vous flâniez ivre sur la voie publique ? On vous a probablement plutôt félicité de ne pas avoir pris votre voiture. C’est pourtant le quotidien des personnes les plus vulnérables de notre société, et cette judiciarisation discriminatoire a des effets dévastateurs sur leur perspectives de réinsertion sociale » déclare Sophie Sénécal, directrice de la Clinique Droits Devant.
« Un tel abandon ne peut se justifier alors que la Ville a elle-même sollicité les organisations pour réviser ses règlements. La Ville ne fait que perpétuer les injustices systémiques auxquelles nos populations, qui se trouvent à la croisée de multiples oppressions, font déjà face. Des actions concrètes et immédiates doivent être prises pour mettre fin à ces discriminations et honorer les engagements pris envers nos communautés. Le statu quo n’est pas une option ! » déclare Sheba Akpokli, direction adjointe associée au Conseil québécois LGBT.
« La décision d’abandonner la révision des règlements municipaux s’ajoute à une série d’actions de plus en plus violentes envers les personnes en situation d’itinérance, tels que les démantèlements de campements, et la priorisation de la répression policière plutôt que le respect des droits humains par l’administration municipale », déclare Sandra Wesley, directrice de Chez Stella, l’amie de Maimie.
« Sur la question de l’itinérance, Valérie Plante a certes une vision saugrenue de la question ! La mairesse de la Ville de Montréal a récemment décrié le manque d’action du gouvernement québécois pour adresser la crise humanitaire que vivent les personnes en situation de l’itinérance. Parallèlement, elle met fin à une démarche de consultation avec le milieu communautaire visant à modifier une dizaine de règlements municipaux de la Ville de Montréal qui stigmatisent depuis des décennies les personnes en situation d’itinérance et empêchent leur processus de réinsertion sociale. L’ironie de cette décision est que Valérie Plante a tous les pouvoirs nécessaires pour agir à ce niveau. Son administration peut modifier ses propres règlements municipaux sans même demander la permission à personne. Concrètement, la mairesse Plante peut agir pour améliorer le bien-être des personnes en situation d’itinérance en ce qui concerne leur surcriminalisation : elle doit passer aux actes avant la fin de son mandat » déclare Me Donald Tremblay, directeur général de la Clinique juridique itinérante.
Faits saillants
Le rapport de la consultation publique de 2017 sur les profilages racial et social contient 31 recommandations. La recommandation 7 prévoit de « procéder à la révision de toutes les dispositions réglementaires et directives du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) et de la Société des transports de Montréal (STM) afin d’identifier si leur application concrète a pour effet d’induire des comportements de profilage ».
La liste des dispositions règlementaires à abroger ou modifier se trouve en Annexe du mémoire de la LDL et du mémoire du RAPSIM déposés en février 2025 à l’Office de consultation publique de Montréal (OCPM) dans le cadre de la consultation « Itinérance et cohabitation sociale à Montréal ».
Lettre de la mairesse de Montréal aux organisations communautaires, 18 février 2025.
Lettre transmise à la mairesse de Montréal, 11 septembre 2024.
Lettre ouverte, Lutte contre le profilage racial et social à Montréal – Pas besoin de baguette magique, La Presse, 23 février 2024.
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Pour informations et entrevues
Elisabeth Dupuis, Responsable des communications de la Ligue des droits et libertés
Cellulaire : 514-715-7727