Les 10 droits fondamentaux des aînés : une rencontre avec la réalité des aîné-e-s d’aujourd’hui

En revendiquant des meilleures conditions de vie pour les personnes aînées, la présidente de l’Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées présente dix droits fondamentaux des aînés qui sont à faire valoir.

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Judith Gagnon, présidente de l’Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées (AQDR)

Un adage dit que « l’on juge une société à la manière dont elle traite ses aîné-e-s ». C’est la façon dont nous nous occupons de nos parents, de nos ancêtres, de nos prédécesseur-e-s, de nos citoyen-ne-s les plus vulnérables et de celles et ceux qui ont bâti notre nation qui définit ce que nous sommes et où nous allons. Le vieillissement de la population ne fait que renforcer l’importance de ce proverbe.

Selon l’Institut de la statistique du Québec (ISQ), en 2030, près de 25 % des citoyen-ne-s du Québec auront 65 ans et plus. Ce nombre atteindra 27 % en 2050. Plus que jamais, nous devons nous questionner sur les droits fondamentaux des personnes aînées. C’est dans ce contexte que l’Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées (AQDR) a lancé en 2016 une consultation nationale afin de déterminer les quatre grands enjeux ainsi que les dix droits fondamentaux qui doivent se trouver au centre de toute démarche qui vise à améliorer la qualité de vie des personnes aînées.

À la suite de cette réflexion, lors de l’Assemblée des président-e-s tenue à Québec en octobre 2017, l’AQDR a lancé son Cahier des revendications 2017-2020, qui rassemble les grands enjeux auxquels doit faire face la société québécoise. Voici une brève description du cahier de revendications. Précisons que ce guide est accessible sur le site internet de l’AQDR.

Droit 1 : Le droit à un revenu décent

Situé au cœur des besoins d’une personne aînée, le droit à un revenu décent a un impact sur toutes les facettes de sa vie. En effet, les personnes aînées touchées par la précarité économique doivent couper dans leurs besoins essentiels et négliger des services nécessaires à leur santé et à leur qualité de vie.

Le revenu décent est basé sur le seuil de revenu viable souvent évoqué par différents groupes et experts, dont l’IRIS dans sa recherche de 2018[1]. Cette mesure est endossée par le Mouvement AQDR parce qu’elle est moins restrictive que la mesure dite du « panier de consommation » limitée au coût d’un panier de consommation de base. Le revenu viable ou seuil de faible revenu permet de suivre les situations de pauvreté sous l’angle de la couverture des besoins de base[2]. En plus de la rémunération de base pour survivre, les aîné-e-s doivent disposer d’un montant supplémentaire qui permette de répondre aux imprévus et de prendre part aux activités de la société. En 2016, ce seuil était de 24 460 $, avant impôts.

Droit 2 : Le droit à un logement convenable

Un logement convenable est un lieu de résidence propre, salubre, en bon état, bien chauffé, sécuritaire et adapté aux réalités des aîné-e-s. Le coût d’une habitation devrait être inférieur à 30 % des revenus déclarés à l’impôt. En 2011, 39 % des personnes âgées de 65 à 74 ans et 51 % de celles âgées de plus de 75 ans dépassaient ce seuil.

Les logements convenables sont de plus en plus rares et leur coût est en augmentation dans les grands centres urbains et les plus petites villes. Plusieurs programmes gouvernementaux peuvent en faciliter l’accès, mais de nombreuses lacunes empêchent les personnes aînées d’en tirer le plein potentiel.

Droit 3 : Le droit à des services à domicile accessibles et de qualité

Le Québec se situe en avant-dernière position des provinces canadiennes, devant l’Île-du-Prince-Édouard, pour ses investissements par personne dans les services à domicile[3].

Le réseau de la santé a été soumis à des compressions et des réformes qui n’ont pas amélioré les services. Le Québec fait face à une pénurie de main-d’œuvre importante qui touche tous les secteurs d’activités. Il manque donc de personnel et de temps alloués aux services à domicile notamment auprès des personnes aînées. Dans bien des cas, malgré les actions du gouvernement du Québec qui favorisent le maintien à domicile, il y a des lacunes importantes à combler pour atteindre un niveau adéquat de services aux aîné-e-s qui font le choix de rester à domicile. Les délais d’attente peuvent être longs. De plus, la façon d’appliquer les critères d’admissibilité varie d’une région à l’autre, ce qui crée des iniquités.

Malgré ce contexte difficile, il faut maintenir cette priorité et trouver des moyens d’attirer de la main-d’œuvre afin de couvrir tous les besoins des aîné-e-s, quelle que soit leur localité de résidence.

Droit 4 : Le droit à des services sociaux et de santé publique de qualité

Les services sociaux[4] et de santé sont organisés en trois niveaux. Les services de première ligne sont fournis notamment par les médecins de famille qui offrent des services généraux et des  soins courants. Les services de deuxième et de troisième lignes, parmi lesquels on retrouve les centres de réadaptation, assurent des services spécialisés et des soins plus complexes. Pour y avoir accès, il faut d’abord consulter un-e professionnel-le de la santé de la première ligne. Ces trois lignes devraient être intégrées de façon à assurer un suivi fluide des problèmes de santé.

À l’heure actuelle, il n’y a toujours pas suffisamment d’investissement dans la prévention, pour favoriser un vieillissement en santé. Notre système de santé est mal adapté aux besoins complexes des personnes aînées. L’offre de services d’hébergement de courte et de longue durée est défaillante. Un plus grand investissement dans les programmes de prévention et le développement et la mise en œuvre de modèles de prestation de services de santé intégrés seraient souhaitables.

Droit 5 : Le droit à une offre de transport collectif accessible et abordable

Le transport collectif[5] est essentiel pour les personnes aînées qui n’ont pas d’automobile. Il regroupe tous les modes de transport en commun : l’autobus, le métro, le tramway et d’autres modes de transport conçus pour répondre aux besoins de certaines clientèles, comme le Taxibus en région et le transport adapté pour personnes à mobilité réduite. Il permet aux personnes aînées d’accéder aux services de base (épicerie, pharmacie, hôpitaux, etc.) et de visiter des proches. Afin d’encourager une retraite active, il est impératif de permettre un accès à ces moyens de transport alternatifs pour les aîné-e-s. Une offre de transport flexible et adapté permet en effet aux personnes âgées sans voiture de conserver leur autonomie et de continuer leurs activités.

Droit 6 : Le droit à un milieu de vie sécuritaire

Pour les personnes âgées, la sécurité est une source importante de préoccupation. Elles peuvent être victimes de violence physique, psychologique, matérielle et financière. Elles cherchent à assurer leur sécurité contre ces diverses formes de violence dans leurs milieux de vie. Pour leur assurer cette sécurité, il importe de leur donner accès à des ressources qui leur permettent de développer des réflexes d’autodéfense et de dénoncer la maltraitance et l’intimidation.

En 2010, préoccupée par la sécurité des aînés, l’AQDR produisait la trousse SOS Abus visant à prévenir les abus et la maltraitance envers les personnes aînées. En novembre 2018, l’AQDR poursuivait la sensibilisation de la population en lançant le guide Prévenir et contrer l’intimidation, même chez les personnes aînées. Ces deux outils se retrouvent sur le site www.aqdr.org.

Droit 7 : Le droit à une participation sociale et citoyenne à part entière

La participation sociale peut prendre plusieurs formes : s’éduquer, s’occuper de ses enfants ou petits-enfants, visiter des ami-e-s ou des voisin-e-s, faire du bénévolat dans un organisme communautaire, etc. Quant à la participation citoyenne, elle passe par l’expression de son point de vue dans des lieux publics, par la participation électorale et par l’implication dans la vie communautaire. Être actif socialement et participer à la vie citoyenne engendre des bienfaits sur la santé physique, mentale et émotionnelle des personnes aînées en plus de contribuer à la vitalité de la communauté.

Droit 8 : Le droit au plein accès au marché du travail et à la conciliation travail-retraite

La retraite ne signifie pas toujours quitter le marché du travail. Plusieurs aîné-e-s décident de retourner sur le marché de l’emploi par plaisir, pour combler un besoin d’accomplissement ou parce que leurs revenus sont insuffisants. Dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, il est de plus en plus opportun que le gouvernement et les entreprises facilitent le maintien au travail des travailleuses et travailleurs plus âgés et profitent ainsi de leur expertise.

Droit 9 : Le droit à l’accès à l’éducation et à la formation culturelle

La capacité d’accéder au savoir et d’apprendre est devenue essentielle pour se maintenir à niveau dans un monde où l’acquisition de nouvelles connaissances et les changements technologiques s’accélèrent. Afin de conserver leur autonomie et de favoriser une participation active au sein de la communauté, il est important de s’assurer que les aîné-e-s aient accès aux activités culturelles qui leur conviennent et qu’elles et ils puissent accéder au savoir et apprendre tout au long de leur vie.

Droit 10 : Le droit à un environnement sain et respectueux de la biodiversité

Reconnaissant l’importance des enjeux climatiques et la nécessité d’agir rapidement, l’AQDR a appuyé, le 13 décembre 2018, la Déclaration citoyenne universelle d’urgence climatique (DUC) qui vise à éviter un bouleversement climatique abrupt et irréversible.

En tant que représentante des aîné-e-s, elle croit qu’il est impératif d’intervenir afin d’assurer un avenir en santé pour les générations futures. Dans son rapport de 2018 sur la situation climatique, la revue The Lancet mentionnait que ce sont les aîné-e-s qui seront les plus touchés par les conséquences des changements climatiques.

Dans son Cahier des revendications 2017-2020, l’AQDR a reconnu l’importance du droit à un environnement sain et respectueux de la biodiversité. Ce droit fait partie des 10 droits qui doivent se retrouver au centre de toute démarche visant à améliorer la qualité de vie des aîné-e-s.

Conclusion

Notre société change, la productivité est souvent priorisée au détriment de l’humain. Les aîné-e-s sont une force pour l’avenir. Ils ont la sagesse en raison de l’expérience qu’ils ont vécue et partagée. Ils sont aussi des actrices et acteurs importants dans la société en raison de leur contribution. Plusieurs aîné-e-s constituent des modèles inspirants. Elles et ils transmettent leurs valeurs, leur savoir-faire et leur savoir-être aux autres générations. La générativité est en quelque sorte une forme d’amour élargi à la progéniture, aux descendant-e-s au sens large, bref à la suite du monde : elle mène à la sollicitude.

L’AQDR en bref…

Fondée en 1979, l’Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées(AQDR) a pour mission exclusive la défense des droits culturels, économiques, politiques et sociaux des personnes à la retraite.

L’AQDR, c’est un mouvement de personnes à la retraite ou à la préretraite regroupées dans une région, pour travailler à la défense des droits collectifs; ses principales revendications sont :

  • Revenu décent, au-dessus du seuil de la pauvreté
  • Logement convenable et à prix abordable
  • Services et soins à domicile pour maintenir l’autonomie
  • Égalité en droit et en fait des femmes et des hommes
  • Accessibilité universelle et gratuite aux services de santé et aux services sociaux.

 

Fondée en 1979, l’Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées (AQDR) a pour mission exclusive la défense des droits culturels, économiques, politiques et sociaux des personnes à la retraite.

L’AQDR, c’est un mouvement de personnes à la retraite ou à la préretraite regroupées dans une région, pour travailler à la défense des droits collectifs; ses principales revendications sont :

  • Revenu décent, au-dessus du seuil de la pauvreté
  • Logement convenable et à prix abordable
  • Services et soins à domicile pour maintenir l’autonomie
  • Égalité en droit et en fait des femmes et des hommes
  • Accessibilité universelle et gratuite aux services de santé et aux services sociaux.

[1] Philippe HURTEAU, Le revenu viable : indicateur de sortie de pauvreté en 2018, Institut de recherches et d’informations socio-économiques (IRIS), Montréal, avril 2018.

[2] On entend par pauvreté, la condition dans laquelle se retrouve un être humain qui est privé des ressources, des moyens, des choix et du pouvoir nécessaires pour acquérir et maintenir son autonomie économique ou pour favoriser son intégration à la société.

[3] Bien vivre pour mieux vieillir : une édition spéciale sur les droits des personnes aînées. La force de l’âge, volume 24, numéro 01, Montréal, automne 2017, p. 8.

[4] Ibid., p. 12.

[5] Ibid., p. 14.

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