Nouveau projet de loi frontalier
Le C-2 soulève des préoccupations majeures pour les libertés civiles, la vie privée et les droits des réfugié-es
La Coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles (CSILC) est encore à analyser le projet de loi C-2, la Loi visant une sécurité rigoureuse à la frontière, mais il est d’ores et déjà très inquiétant.
De nombreux aspects du projet de loi n’ont que peu ou rien à voir avec la « sécurisation de la frontière », et de nombreux aspects liés à la frontière représentent une menace importante pour les droits de la personne et les libertés civiles.
Il est clair que, sous prétexte de s’occuper de la sécurité frontalière et d’apaiser l’administration Trump, le gouvernement cherche à obtenir des pouvoirs exceptionnels qu’il a tenté sans succès d’obtenir par le passé et qui auront des répercussions négatives de grande envergure.
Lire le communiqué publié le 6 juin 2025 par la CSILC.
Le gouvernement libéral a déposé un nouveau projet de loi omnibus sur la sécurité nationale et frontalière, le projet de loi C-2, la Loi visant une sécurité rigoureuse à la frontière.
Nous sommes encore à analyser le projet de loi, mais il est d’ores et déjà très inquiétant. De nombreux aspects du projet de loi n’ont que peu ou rien à voir avec la « sécurisation de la frontière », et de nombreux aspects liés à la frontière représentent une menace importante pour les droits de la personne et les libertés civiles. Il est clair que, sous prétexte de s’occuper de la sécurité frontalière et d’apaiser l’administration Trump, le gouvernement cherche à obtenir des pouvoirs exceptionnels qu’il a tenté sans succès d’obtenir par le passé et qui auront des répercussions négatives de grande envergure.
Bien qu’une étude plus approfondie puisse donner lieu à d’autres sujets de préoccupation, les principaux problèmes que nous avons identifiés jusqu’à présent sont les suivants :
- Les modifications apportées à la Loi sur la Société canadienne des postes permettraient à cette agence (en fonction des règlements approuvés par le Cabinet) d’ouvrir et de lire le courrier, ce qui est actuellement interdit.
- Les modifications apportées à la Loi sur les océans transformeraient la Garde côtière canadienne (GCC) en force de sécurité, lui permettant de participer « à des patrouilles de sécurité, de même qu’à la collecte, à l’analyse et à la divulgation d’informations ou de renseignements ». Aucun organisme de surveillance ou d’examen indépendant des activités de la GCC n’est prévu.
- Les modifications apportées à la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR) permettraient le partage généralisé de renseignements personnels des personnes qui immigrent au Canada avec d’autres ministères, ainsi qu’avec des entités étrangères (avec des mesures de protection minimales).
- D’autres modifications à la LIPR limiteraient drastiquement et arbitrairement la capacité des personnes à demander l’asile au Canada, en violation du droit international des droits de la personne. Cela comprend l’obligation de présenter une demande d’asile dans l’année suivant l’arrivée d’une personne au Canada, sans tenir compte du fait que, à tout moment, les circonstances peuvent changer dans son pays d’origine. Ces modifications vont encore plus loin que les limites actuelles imposées par les États-Unis sur les demandes d’asile qui prévoient certaines exceptions. Ces modifications amenderaient également les règles pour les demandeur-es d’asile qui entrent au Canada en provenance des États-Unis en dehors des postes-frontière – des règles qui étaient déjà trop restrictives en vertu de l’Entente sur les tiers pays sûrs avec les États-Unis. À l’heure actuelle, les réfugié-es peuvent présenter une demande d’asile 14 jours après leur arrivée au Canada. Le projet de loi éliminerait complètement cette possibilité. Cela obligerait encore plus de demandeur-es d’asile à rester aux États-Unis, alors que ce pays n’est pas sûr pour les réfugié-es.
- Les modifications apportées à la LIPR permettraient également au gouvernement d’annuler ou de suspendre des ensembles de documents d’immigration (visas, par exemple), de suspendre l’acceptation de nouvelles demandes ou de suspendre ou d’annuler des demandes déjà en attente. Tout cela en invoquant « l’intérêt public », y compris la sécurité nationale, ce qui pourrait entrainer l’annulation ou la suspension en bloc des demandes en provenance de certains pays ou de certains types de visas ou de documents d’immigration, etc. Une situation qui s’apparente à celle qui prévaut aux États-Unis.
- Le projet de loi relance une fois de plus les tentatives visant à établir des pouvoirs d’« accès légal » pour la police et le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), que de nombreux gouvernements précédents ont tenté de faire adopter. Les modifications apportées au Code criminel et à la Loi sur le SCRS faciliteraient l’accès à des renseignements comme les adresses IP, y compris sans mandat en cas d’urgence. Cela permettrait également aux organismes d’application de la loi et de renseignement de demander ces renseignements à des entités étrangères et ouvrirait la porte à des demandes réciproques de la part de gouvernements étrangers.
- Le projet de loi C-2 créerait également une nouvelle Loi sur le soutien en matière d’accès autorisé à de l’information qui obligerait les « fournisseurs de services électroniques (FSE) » (fournisseurs de messagerie, plateformes de médias sociaux, fournisseurs de services Internet, etc.) à se conformer pleinement aux demandes d’accès ou d’interception d’informations et de communications (par exemple, à veiller à ce que les renseignements détenus par les fournisseurs de services électroniques soient organisés et stockés de manière à ce qu’ils puissent être consultés par la police et le SCRS). Malgré l’assurance qu’aucune « porte dérobée » dans les services de chiffrement ne serait exigée des FSE, le projet de loi autoriserait néanmoins le gouverneur en conseil à prendre des mesures réglementaires concernant la définition du terme « chiffrement », ce qui suscite des inquiétudes quant au fait que la définition gouvernementale pourrait contourner ces assurances.
Compte tenu de l’ampleur de ces préoccupations et des dangers qu’elles représentent pour les libertés civiles et les droits de la personne, nous demandons au gouvernement et aux député-es de retirer le projet de loi C-2. Si le gouvernement veut vraiment répondre aux préoccupations concernant le trafic illégal d’armes à feu et de drogues, il doit présenter un projet de loi spécifiquement adapté à cet objectif, plutôt qu’un projet de loi omnibus de grande envergure. Dans l’éventualité d’une nouvelle loi remplaçant le projet de loi C-2, le gouvernement devrait s’assurer de consulter pleinement les expert-es en matière de libertés civiles, de protection de la vie privée et des droits des migrant-es et des réfugié-es avant qu’il ne soit présenté aux député-es.
Nous vous invitons à communiquer avec votre député-e pour l’exhorter à rejeter le projet de loi et à exiger qu’il soit retiré :
Prière d’inclure le ministre de la Sécurité publique et le ministre de la Justice dans l’envoi de votre courriel : ps.ministerofpublicsafety-ministredelasecuritepublique.sp@canada.ca, mcu@justice.gc.ca
La LDL est membre de la CSILC.