Le 24 juin, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à la santé, M. Dainius Pūras, a présenté au Conseil des Droits de l’Homme le rapport faisant suite à sa visite au Canada, en novembre dernier. Le Rapporteur spécial y demande que tous les paliers de gouvernement en fassent davantage pour respecter le droit à la santé, en lien avec leurs engagements internationaux et pour s’acquitter de manière exhaustive de leurs obligations de protéger, de respecter et d’exercer les droits.
Durant son passage au Québec, 14 organisations provinciales de la société civile dont la Ligue des droits et libertés lui ont présenté un état des lieux quant au droit à la santé au Québec. Elles demandent aux gouvernements du Canada et du Québec de donner suite, dans les plus brefs délais, aux recommandations du Rapporteur spécial, à commencer par celle d’adopter une approche globale de droits humains en matière de santé. Cela signifie, notamment :
- Prévoir et donner accès, sans discrimination, à des moyens de recours, de justice et de réparation, en cas de violation du droit à la santé (paragraphe 103 du Rapport);
- Inclure les critères du droit à la santé (disponibilité des soins et services, accès gratuit et sans-discrimination, qualité, etc.) dans la Loi canadienne sur la santé et dans les transferts fédéraux aux provinces (par.104);
- Assurer la mise en place de l’assurance médicaments publique et universelle (par.105);
- Soutenir les organisations communautaires et sans but lucratif du secteur de la santé et des services sociaux avec du financement à long terme (par.106);
Également, à l’instar du Rapporteur spécial, les 4 organisations rappellent l’importance cruciale que soient pris en compte, dans les approches et stratégies, les déterminants sociaux de la santé physique et mentale, notamment l’accès à l’alimentation, à l’éducation, au logement, à la sécurité. Le Rapporteur a notamment souligné que les situations de pauvreté nuisent grandement à l’accès aux services de santé et aux programmes sociaux, en se basant sur les faits et analyses entendus au Québec (par. 88).
Aussi, il est plus qu’urgent d’apporter toute l’attention nécessaire au droit à la santé des Peuples autochtones, notamment dans les communautés où les soins de santé et médicaux sont indisponibles ou largement insuffisants.
L’ensemble des recommandations du Rapporteur permettraient que les efforts et les ressources soient réellement consacrés à combler les principaux fossés de nos systèmes actuels, à savoir (par. 36) :
- les services essentiels, mais encore non couverts par la Loi canadienne – et donc insuffisamment par les systèmes publics provinciaux (les soins de santé mentale et dentaires, les médicaments, etc.);
- les disparités entre les communautés, régions, provinces et territoires;
- l’accès limité aux soins de santé pour les personnes en situation de vulnérabilité, y compris les Peuples autochtones, les personnes réfugiées ou migrantes, les personnes en situation d’itinérance et celles vivant avec un handicap;
- et le manque de parité entre soins de santé physique et ceux pour la santé mentale – ces derniers étant encore, largement, laissés pour compte.
Comme le souligne justement M. Pūras : « la qualité des services de santé au Canada est très bonne si vous pouvez y avoir accès. ». Il est donc impératif que les gouvernements adoptent une approche globale de droits humains en matière de santé et services sociaux; et, ce faisant, travaillent en collaboration avec les organisations de la société civile du secteur.
Ce communiqué est publié par les 14 organisations ci-dessous, dont plusieurs ont fait des déclarations suite à la présentation du rapport final de M. Pūras :
- L’Alliance des communautés culturelles pour l’égalité dans la santé et les services sociaux (ACCÉSSS)
- « L’AGIDD-SMQ est heureuse de constater que le Rapporteur spécial de l’ONU recommande au Canada de considérer la santé mentale au même titre que la santé physique. Mais surtout, nous invitons le Canada et le Québec à être particulièrement vigilants afin que les services en santé mentale soient basés sur la réalisation des droits humains et non sur la surmédicalisation, l’institutionnalisation et d’autres formes de coercition, non seulement dans le reste du monde, mais également ici», souligne Doris Provencher, directrice générale de l’Association des groupes d’intervention en défense des droits en santé mentale du Québec (AGIDD-SMQ).
- « La COCQ-SIDA remercie le Rapporteur spécial d’avoir pris le temps de rencontrer plusieurs organisations communautaires lors de sa visite au Canada et d’écouter nos préoccupations en matière de droit à la santé. La COCQ-SIDA a notamment abordé, lors de son témoignage, que la criminalisation du travail du sexe et la criminalisation de la non-divulgation du statut sérologique constituent des obstacles au droit à la santé des travailleuses-eurs du sexe et des personnes vivant avec le VIH au Canada, et est satisfaite que M. Pūras le confirme au sein de son rapport» a déclaré Me Léa Pelletier-Marcotte, coordonnatrice du programme Droits de la personne et VIH, à la Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le sida (COCQ-SIDA).
- La Coalition Solidarité-Santé
- « Tout comme la Confédération des organismes de personnes handicapées du Québec, le Rapporteur spécial reconnait qu’il subsiste des lacunes dans l’accès aux services de soins de santé concernant principalement les groupes en situation de vulnérabilité», a souligné Claude Guimond, Directeur général de la Confédération des organismes de personnes handicapées du Québec (COPHAN).
- La Fédération du Québec pour le planning des naissances
- « Tous les droits sont interdépendants. Le droit à la santé est intimement lié au droit au logement, à un revenu décent, à l’alimentation, C’est ce que la Ligue des droits et libertés a rappelé au Rapporteur lors de son passage au Canada. Il est impératif que les gouvernements tiennent compte de ce principe phare de la réalisation effective des droits économiques et sociaux dans l’élaboration et l’application de leurs politiques publiques», explique Christian Nadeau, président de la Ligue des droits et libertés.
- Dre Isabelle Leblanc, présidente de Médecins québécois pour le régime public (MQRP), souligne que « comme le mentionne le rapport, de nombreux soins et services médicalement nécessaires sont difficiles d’accès pour les patients à cause de barrières financières et structurelles et que cette situation compromet le droit à la santé. »
- « Assurer le droit à la santé chez les jeunes atypiques ou en difficulté repose nécessairement sur une bonne connaissance de leurs besoins et des difficultés qu’ils rencontrent. Les services qui leur sont offerts jouent un rôle essentiel pour leur accès au système de santé et leur adaptation sociale et professionnelle. Malheureusement, tel que souligné dans le rapport, il y a encore des lacunes. Ainsi le ROCAJQ se joint aux recommandations du Rapporteur spécial, et insiste sur l’urgence d’agir afin que le gouvernement consacre les efforts et les ressources supplémentaires afin d’assurer des services qui correspondent adéquatement aux besoins des jeunes aux parcours de vie différentiés et préviennent des problématiques et atteintes à leurs droits » a précisé Julie Ouellet, directrice générale du Regroupement des organismes communautaires autonomes Jeunesse du Québec (ROCAJQ)
- « Les enfants sont des citoyennes et des citoyens à part entière, qui ont droit de vivre une enfance exempte de violence et de pauvreté. Le ROEQ se réjouit de constater que le Rapporteur spécial prône l’adoption d’une approche globale de droits humains en matière de santé.La prévention de toutes les formes de violence faites aux enfants – que l’on parle d’intimidation, de négligence, de violence sexuelle, psychologique, verbale, physique ou d’exposition à la violence conjugale ou de violence dans les relations amoureuses – doit être une priorité pour nos gouvernements. Vivre en sécurité et sans violence est un droit, et nous devons le faire respecter pour nos enfants », a déclaré Anne-Valérie Lemieux Breton, du Regroupement des organismes ESPACE du Québec (ROEQ).
- « Le RRASMQ souhaite souligner l’importance que nous transformions, en concordance avec les recommandations du Rapporteur spécial de l’ONU, les pratiques en santé mentale, de façon à mettre fin à la dominance des approches biomédicales et à la surutilisation de la médication psychotrope. Nous invitons le Canada à investir davantage et plus directement sur les déterminants sociaux de la santé, le respect des droits des personnes et l’accès à des approches psychosociales. Il est temps que nous brisions le cycle de la discrimination et de l’exclusion des personnes aux prises avec un problème de santé mentale», souligne Anne-Marie Boucher, responsable aux communications du Regroupement des ressources alternatives en santé mentale du Québec (RRASMQ).
- « Le manque d’accès aux soins pour nombreuses personnes en situation de vulnérabilité ainsi que le non-respect des droits fondamentaux en santé, représentent pour le Regroupement Naissance-Renaissance des violences systémiques. Si les recommandations du Rapporteur spécial étaient mise en œuvre, ce serait un bon premier pas», selon Lorraine Fontaine, coordonnatrice du Regroupement Naissance-Renaissance.
- Le Réseau Solidarité Itinérance du Québec
- « La Table est ravie que le Rapporteur spécial souligne l’apport exceptionnel des organisations communautaires et de la société civile à développer des approches innovantes, basées sur les droits et la dignité humaine, en matière de santé et de services sociaux. La Table espère vivement que les gouvernements prendront acte, et travailleront avec les groupes communautaires du secteur pour reconnaître et implanter une véritable approche de droit à la santé », a déclaré Mercédez Roberge, coordonnatrice, Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles (TRPOCB).