Entre la violation et la réclamation des droits des personnes qui résident en campement : À qui la rue?

Des mesures urgentes doivent être mises en place pour respecter les droits des personnes qui résident en campement comme le droit au logement, à la dignité et à la sécurité.
une tente est plantée devant la façade d'un édifice en ville

Entre la violation et la réclamation des droits des personnes qui résident en campement : À qui la rue?

Un carnet rédigé par

Caroline Leblanc, Doctorante en santé communautaire à la faculté de médecine et sciences de la santé de l’Université de Sherbrooke
Sue-Ann MacDonald
, Professeure agrégée, École de travail social de l’Université de Montréal
Isabelle Raffestin,
Doctorante en travail social à l’Université de Montréal
Émilie Roberge
,
Étudiante au baccalauréat en travail social à l’Université du Québec à Montréal
Laury Bacro
, Professionnelle de recherche en itinérance et alliée en défense des droits

Cette tribune permet d’aborder des sujets d’actualité qui sont en lien avec les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels au Québec, au Canada ou ailleurs dans le monde. Les carnets sont rédigés par des militant-e-s des droits humains et n’engagent que leurs auteurs et autrices.


Bien que les campements existent depuis des décennies, la pandémie de COVID-19 a chamboulé plusieurs vies qui se sont vues basculer dans une précarité et dans une vulnérabilité sociale et économique importantes. Une réalité qui est venu multiplier les visages de l’itinérance et augmenter la visibilité des personnes qui résident en campement. Une réalité qui démontre les lacunes de notre filet social et qui devient ainsi une forme de revendication à l’accès aux droits.

En parlant des personnes en situation d’itinérance, Guylain Levasseur, un occupant d’un campement, précise qu’à un moment donné, il « faut être visible pour combattre l’itinérance » (Gildener et Paré, 2021, 27 avril).

Reconnaissance du droit au logement

Rappelons qu’en 2019, le gouvernement fédéral a adopté une loi qui reconnait, pour la première fois, le droit au logement, un droit essentiel pour respecter la dignité et le bien-être des personnes. Ce droit est aussi reconnu par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels que le Canada a signé et auquel il s’est engagé. Mais qu’en est-il du droit au logement pour les personnes qui résident en campement ?

Malheureusement bien que le droit au logement soit reconnu au Canada, l’absence d’une définition ainsi que d’un cadre juridique et politique clair pour mettre en œuvre ce droit est un frein significatif qui ne permet pas à tous-tes de l’exercer. Cependant, lorsque les personnes dépendent de la rue pour vivre, notre société a des responsabilités à leur égard. Par contre, les différentes instances sont encore réticentes à adopter une approche basée sur les droits lorsqu’il est question de personnes qui résident en campement. Mais qu’arrive-t-il lorsque nos instances n’arrivent pas à répondre au droit au logement dans la forme dite abordable et sécuritaire pour le revenu de chacune d’entre elles et accessible selon leurs conditions ?

Respecter les droits

Dans une réelle approche axée sur les droits, les instances devraient mettre en place des mesures urgentes pour respecter les droits des personnes qui résident en campement. Il faudrait alors rendre accessible de l’eau potable, des installations sanitaires, une gestion des déchets ainsi que des ressources et du soutien nécessaires pour assurer leur sécurité par exemple et par-dessus tout, une réelle participation dans les décisions qui les concernent. Dans les faits, ce n’est pas la réalité que vivent ces personnes. Elles sont plutôt exposées à de multiples violations de leurs droits tel que celui au logement, à la sécurité, à la vie et à la dignité. De même, il est d’autant plus important de reconnaître que parmi ces nombreuses personnes, celles issues des Premières Nations et Inuit sont surreprésentées dû au colonialisme et à la dépossession historique de leurs terres.

Avant tout la répression

Les mesures coercitives pour contrôler la présence des personnes qui résident en campement nuisent à leur sécurité, leur vie et leur dignité. Ces personnes sont continuellement exposées à une répression qui se traduit par une présence policière accrue, des contraventions, des arrestations, des expulsions forcées et la destruction de leurs biens ainsi que leur chez soi. Ceci est donc le résultat d’une absence de politique coordonnée intergouvernementale pour rendre disponible des logements adéquats pour tous et toutes et d’un manque de réponse globale axée sur les droits humains.

Pourquoi sont-elles exposées à vivre une aussi grande répression ? Nous vous invitons à lire les différents rapports[1] sur les campements au Canada qui présentent des études de cas au Québec[2], en Ontario[3] et en Colombie-Britannique[4]. Ces exemples, sur les réalités vécues par les personnes qui résident en campement, mettent en lumière l’application des règlements administratifs, et soulignent comment l’approche répressive privilégiée ne résout pas les enjeux sous-jacents aux campements. Cela dit, le rapport synthèse sur les campements au Canada ainsi que les études de cas présentées dans les différentes régions permettent de réfléchir à un cadre sur les droits des personnes qui résident en campement en plus d’aborder des recommandations spécifiques qui peuvent faire avancer nos réflexions et nos actions vers une approche axée sur les droits humains.


[1] https://www.rondpointdelitinerance.ca/ressource/rapport-de-synth%C3%A8se-sur-les-campements-au-canada-une-approche-ax%C3%A9e-sur-le-droit-au

[2] https://www.rondpointdelitinerance.ca/ressource/%C3%A9tude-de-cas-montr%C3%A9al-sherbrooke-et-gatineau

[3] https://www.rondpointdelitinerance.ca/ressource/%C3%A9tude-de-cas-hamilton

https://www.rondpointdelitinerance.ca/ressource/%C3%A9tude-de-cas-toronto

[4] https://www.rondpointdelitinerance.ca/ressource/%C3%A9tude-de-cas-vancouver

https://www.rondpointdelitinerance.ca/ressource/%C3%A9tude-de-cas-prince-george