Communiqué de presse
Pour diffusion immédiate
Arrestations de masse lors de manifestations à Montréal entre 2011 et 2015 – Des représentant-e-s des recours collectifs interpellent la mairesse et le chef du SPVM
La Ligue des droits et libertés a participé à cette conférence organisée par les représentant-e-s des recours collectifs.
Montréal, 14 mars 2023 – Entre 2011 et 2015 inclusivement, des milliers de personnes ont été injustement et illégalement arrêtées par le SPVM dans le cadre de dizaines de manifestations tenues dans les rues de Montréal. Douze d’entre elles, notamment plusieurs manifestations du 15 mars contre la brutalité policière, ont fait l’objet de recours collectifs représentant plus de 3200 personnes. Ils dénoncent les conditions de détention dégradantes lors d’arrestations de masse et la violation répétée de la liberté d’expression et de rassemblement pacifique. Néanmoins, ces recours n’iront pas à procès, puisque la Ville de Montréal reconnaît aujourd’hui —après s’être engagée à reculons dans ce processus— avoir brimé les droits fondamentaux de milliers de personnes en les empêchant de manifester. Les parties se sont entendues pour une indemnisation globale de 6 millions de dollars, dont la distribution entre les personnes arrêtées est commencée, et la déclaration suivante de la Ville de Montréal :
« Entre 2011 et 2015, divers mouvements de contestations sociales (sic) ont entraîné d’importantes manifestations à Montréal. Dans le cadre du règlement hors cour de 16 actions collectives pour lesquelles la Ville de Montréal est poursuivie dans ce contexte, celle-ci reconnaît que certains gestes posés par les forces policières et l’administration municipale à l’égard des participantes et participants aux manifestations visées par les présentes actions collectives, ont porté atteinte à certains de leurs droits fondamentaux, leur causant ainsi des dommages. C’est pour cette raison que la Ville de Montréal offre publiquement ses excuses à toutes ces personnes. »
Pas d’excuses au rabais
Il s’agit d’une reconnaissance à laquelle les représentantes et représentants des recours tenaient absolument, mais ces excuses sont diffusées au moyen d’un simple hyperlien vers un PDF au bas de la page du service des affaires juridiques de la Ville. Nous ne voulons pas d’excuses au rabais ! Nous estimons que le communiqué devrait être mieux publicisé. Étant donné les faits accablants, nous persistons et demandons que la mairesse Valérie Plante et le chef du SPVM, Fady Dagher, reconnaissent publiquement les torts causés aux milliers de manifestant·es que nous représentons.
L’objectif des recours collectifs n’était pas de réduire nos droits fondamentaux à une somme d’argent, mais d’amener la Ville à assumer pleinement les conséquences de sa gestion antidémocratique des manifestations. Les excuses n’ont de sens que si elles sont clairement, explicitement et publiquement exprimées et assumées. D’ailleurs, il y a des précédents en la matière. Par exemple, en 2017, l’ancien maire Denis Coderre avait présenté des excuses publiques et officielles pour les descentes policières discriminatoires et violentes qui avaient visé la communauté LGBTQ+ entre les années 1960 et les années 1990.
Le juge reconnaît des comportements préjudiciables du SPVM
Dans son jugement du 22 février 2023, le juge Martin Sheehan de la Cour supérieure tient explicitement le SPVM pour responsable de « comportements préjudiciables » et l’invite à revoir ses pratiques dans un sens respectueux de l’exercice de la liberté d’expression et du droit de manifester. Selon nous, le SPVM a pendant des années miné de fait le droit fondamental de manifester, et ce, sur la base d’un profilage politique, puisque seules des manifestations associées au mouvement étudiant ou à la gauche radicale ont eu à subir cette répression. Il s’agit là de notre plus importante victoire, non seulement pour les membres des recours collectifs, mais pour la société en général. Aussi, au-delà des excuses, que fera la mairesse Valérie Plante pour faire passer le message du juge Sheehan aux forces policières, alors que le budget annuel de la police a été haussé de 63 millions de dollars supplémentaire en 2023 (pour atteindre un total de 787,1 M$) et que la Ville de Montréal dispose déjà de plus de policiers par habitant·e·s que toute autre grande ville canadienne?
Une victoire importante, mais la vigilance reste de mise
Toute cette histoire nous rappelle que l’adoption de règlements liberticides et les abus policiers ne sont pas une menace lointaine qui ne toucherait que les régimes autoritaires. Les droits et libertés civiques se doivent non seulement d’être constamment revendiqués et défendus, mais aussi et surtout exercés. Cela requiert une vigilance et un engagement de tous les jours. Nous savons que plusieurs batailles se dressent encore devant nous. C’est autour du profilage racial que le SPVM est sur la sellette depuis quelques années. Mise sous pression, la Ville de Montréal embauchait récemment un nouveau chef de police, M. Fady Dagher. Ce dernier promettait des « changements profonds » pour mettre fin au profilage racial (Le Devoir, 9 février 2023). D’aucuns diront qu’il faut laisser la chance au coureur. Nous préférons miser sur la mobilisation populaire. Comme nous l’avons démontré avec nos recours collectifs, seule la lutte paie !
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Pour les demandes d’entrevues : Lian Francis, avocat | 514-758-5426 | [email protected]
Avis de MMGC : https://www.mmgc.quebec/wp-content/uploads/2023/02/Jugement-approbation2023-02-22.pdf
Avis de Arsenault Dufresne Wee Avocats : http://adwavocats.com/pdf28/2022-11-17_Jugement_sur_les_avis_aux_membres.pdf
Avis de Grey Casgrain : https://greycasgrain.com/actions-collectives-contre-la-ville-de-montreal/