Le projet de loi 28, une prolongation masquée de l’état d’urgence sanitaire

La LDL demande au gouvernement Legault de faire preuve de transparence et de fournir rapidement des précisions sur les pouvoirs accordés par ce projet de loi. La LDL rappelle également que la levée de l’état d’urgence sanitaire doit être complète et se faire dans le respect des processus démocratiques.

Communiqué de presse
Pour diffusion immédiate

Montréal, le 16 mars 2022 — La Ligue des droits et libertés (LDL) s’oppose au projet de loi 28, Loi visant à mettre fin à l’état d’urgence sanitaire (PL 28), déposé ce matin à l’Assemblée nationale par le ministre de la Santé et des Service sociaux Christian Dubé. Après deux ans de pandémie, le gouvernement ne fait pas la preuve que les mesures exceptionnelles doivent être maintenues. Il faut se rappeler que ces mesures impactent négativement les droits et nuisent au fonctionnement démocratique.

Il est vrai que le PL 28 met fin à de nombreuses pratiques abusives, telle que l’adoption de décrets et d’arrêtés pour gérer la crise sanitaire sans que le gouvernement n’ait à consulter au préalable l’Assemblée nationale et la société civile.

Toutefois, le PL 28 permet la continuation de mesures dites « opérationnelles » jusqu’au 31 décembre 2022, mesures adoptées sans débat sous l’égide de l’état d’urgence sanitaire des deux dernières années. « M. Dubé s’est contenté de lister des exemples d’application de ces pouvoirs, comme la poursuite de l’application de certains contrats octroyés de gré à gré pour faciliter la vaccination et le dépistage, ou encore la gestion des conditions de travail des employé-e-s de la santé et des services sociaux. Or, ces applications font justement partie de celles qui auraient dû faire l’objet de l’attention de l’Assemblée nationale durant les deux dernières années! » déclare Catherine Descoteaux, porte-parole de la LDL.

Encore plus inquiétant, durant sa conférence de presse de ce midi, le ministre Dubé n’a pas été en mesure de détailler avec précision quels pouvoirs il continuerait de s’arroger à partir de la levée d’état d’urgence, mais il a avancé fournir une « assurance morale » à la population qu’il n’en ferait pas usage. « Quels décrets et arrêtés adoptés durant les deux dernières années seront encore en vigueur? Quels pouvoirs accordés de manière non démocratique le gouvernement compte-t-il garder? À quelles fins précises les renseignements personnels obtenus seront-ils utilisés? Nous avons besoin de davantage de précisions pour être en mesure de comprendre la portée du PL 28! La fin de l’état d’urgence doit venir avec le retour de la transparence et avec la santé de nos institutions démocratiques! » poursuit Madame Descoteaux.

La LDL demande au gouvernement Legault de faire preuve de transparence et de fournir rapidement des précisions sur les pouvoirs accordés par ce projet de loi. La LDL rappelle également que la levée de l’état d’urgence sanitaire doit être complète et se faire dans le respect des processus démocratiques.

Faits saillants

Le projet de loi 28 maintient les pouvoirs suivants liés à l’état d’urgence qui ne nécessiteront pas l’aval de l’Assemblée nationale :

    • Les mesures adoptées en vertu de l’état d’urgence par décrets et arrêtés dans les deux dernières années demeurent en vigueur jusqu’au 31 décembre 2022. Le gouvernement peut les modifier ou les abroger « afin de permettre un allègement graduel des mesures ».
    • Le gouvernement reproduit textuellement le texte du paragraphe 123(3) de la Loi sur la santé publique (LSP) pour maintenir le pouvoir concernant la communication de renseignements personnels.
    • Les contrats conclus pendant l’état d’urgence sanitaire peuvent être prolongés jusqu’au 31 décembre 2022 s’ils sont nécessaires pour assurer le bon fonctionnement des cliniques de dépistage et de vaccination. Malgré ceci, la durée ou la valeur de tout contrat peut être prolongée ou augmentée pour une période maximale de 5 ans, si le contrat a pour objet l’entreposage ou le transport de bien acquis pendant la pandémie.
    • Les amendes salées allant de 1 000 à 6 000 $ peuvent être maintenues pour la contravention aux mesures adoptées par décrets ou arrêtés.

La FSSS-CSN, la FSQ-CSQ, la FIQ et la FIQP, le SQEES-FTQ, le SCFP, l’APTS, la FP-CSN et le SPGQ ont réagi à l’annonce concernant le PL 28 en dénonçant le pouvoir que conserve le gouvernement pour gérer les conditions de travail des travailleurs et travailleuses de la santé et des services sociaux.

Le 13 mars 2022 a marqué le deuxième anniversaire de l’état d’urgence sanitaire au Québec, lequel a été renouvelé par décrets 117 fois depuis.

Depuis le 26 mai 2021, la LDL et 124 organisations demandent la levée de l’état d’urgence sanitaire, voir la déclaration de la LDL.

À propos de la Ligue des droits et libertés

La LDL est un organisme sans but lucratif, indépendant et non partisan, issu de la société civile québécoise et affilié à la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH). Depuis plus de 50 ans, elle milite en faveur de la défense et de la promotion de tous les droits humains reconnus par la Charte internationale des droits de l’homme.

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Pour informations et entrevues :
Elisabeth Dupuis, Responsable des communications de la Ligue des droits et libertés
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