Communiqué de presse
Pour diffusion immédiate
Montréal, le 26 février 2021 – La Ligue des droits et libertés (LDL) a pris connaissance aujourd’hui des recommandations de la Commission de la sécurité publique (CSP) de Montréal à la suite de la consultation de septembre 2020 sur la Politique sur les interpellations policières du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM). La LDL considère qu’un moratoire sur les interpellations policières est nécessaire à Montréal et partout au Québec et que la CSP ne va pas assez loin avec ses recommandations qui se limitent à encadrer les interpellations et à réduire leur nombre.
Aucun fondement juridique aux interpellations policières
Premièrement, la LDL rappelle qu’une interpellation policière (aussi appelée street check ou contrôle policier de routine) est une situation où un policier questionne une personne (piéton ou passager de véhicule) afin d’obtenir des renseignements identificatoires ou personnels à l’extérieur du contexte d’une arrestation, d’une détention ou d’une enquête. De plus, ces informations sont ensuite généralement enregistrées dans une base de données policière informatisée qui est utilisée à des fins de renseignements policiers.
L’interpellation policière est une pratique qui ne repose sur aucun fondement juridique (ni dans la loi, ni dans la common law). La LDL déplore que la CSP ne se soit pas penchée sur la question centrale de la légalité de cette pratique policière, comme l’a fait le gouvernement de la Nouvelle-Écosse en requérant un avis juridique indépendant sur la pratique avant d’en arriver à la conclusion en octobre 2019 qu’il fallait l’interdire. « La CSP dit que c’est aux tribunaux qu’il revient de trancher l’enjeu de la légalité des interpellations, mais elle se trompe : l’interpellation est une pratique qui en raison même de sa nature ne mènent pas à des accusations dont on peut se défendre devant un tribunal » déclare Lynda Khelil, porte-parole de la LDL.
Réduire les interpellations policières, tel que le recommande la CSP, et mettre fin aux interpellations liées à la prévention des incivilités est une bonne chose, mais la CSP n’a pas répondu à une question cruciale : quelle est la nécessité des interpellations?
« La nécessité des interpellations policières n’a à ce jour pas été démontrée ni par le SPVM, ni par la Ville de Montréal, ni par le ministère de la Sécurité publique (MSP). C’est pourtant la toute première question à se poser! Surtout quand on sait que ce sont les communautés autochtones, racisées et marginalisées qui sont ciblées par cette pratique qui s’apparente à du fichage! » poursuit la porte-parole.
Aucune obligation pour les policiers d’informer la personne interpellée de ses droits
La CSP ne recommande pas que les policiers informent la personne interpellée qu’elle n’est pas tenue de s’identifier. La CSP n’a pas retenu les recommandations de diverses organisations qui demandaient qu’au minimum, les policiers disent à toutes les personnes interpellées qu’elles ne sont pas obligées de répondre à leurs questions. « Il est aberrant que les policiers n’aient pas l’obligation d’informer les citoyen-ne-s de leurs droits! » dénonce Mme Khelil.
Plusieurs recommandations très pertinentes
La LDL relève que la CSP a par ailleurs émis plusieurs recommandations importantes que le SPVM, la Ville de Montréal et le MSP devront mettre en œuvre rapidement dans le cadre de la lutte aux profilages racial et social systémiques. « Ces recommandations concernent le profilage racial et social persistant lors d’interceptions d’automobilistes, des collectes de données nécessaires, des exercices de reddition de compte publiques et périodiques, et des mesures pour accroître la transparence et l’imputabilité des corps policiers », déclare Mme Khelil, porte-parole de la LDL.
Un moratoire et une consultation publique indépendante sur les interpellations policières
En conclusion, tel qu’elle l’a exposé dans son mémoire en septembre 2020, la LDL considère que « l’instauration d’un moratoire immédiat à Montréal et partout au Québec est la seule façon de mettre fin définitivement aux violations de droits et libertés inhérentes à toutes les interpellations policières, et à l’insécurité qu’elles génèrent au sein des communautés racisées et autochtones qui sont surinterpellées. Pendant ce moratoire, il faudra une consultation publique indépendante où l’interdiction de la pratique des interpellations sera à l’étude » conclut Mme Khelil.
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