Retour sur le rapport du Groupe d’action contre le racisme

Le GARC pourra-t-il avoir un réel impact sur les luttes contre les discrimination et le racisme systémiques?
Un carnet rédigé par Diane Lamoureux, militante au comité racisme, exclusion sociale et laïcité de l’État de la LDL.

À chaque semaine, l’actualité met en avant-plan des nouvelles où la discrimination et le racisme systémiques apparaissent en filigrane. Est-ce que le Groupe d’action contre le racisme (GACR) pourra jouer un rôle réel à réduire les situations de discrimination et racisme systémiques ? Avec le refus de Québec à participer au programme fédéral de reconnaissance des personnes ayant un statut temporaire, voyons voir comment le GACR n’est pas en position d’influencer des politiques et des programmes du gouvernement provincial.

Le rapport du Groupe d’action contre le racisme

Le GACR a remis son rapport, Tolérance Zéro, en décembre dernier. Ce rapport repose sur la prémisse que le racisme est le fait de préjugés et de comportements déplacés et refuse donc, comme l’ensemble du gouvernement caquiste, d’utiliser la notion de racisme systémique. En outre, il identifie deux groupes comme étant les plus vulnérables au racisme, les « minorités visibles » (notion qui n’est pas définie) et les Autochtones, tout en élaborant des politiques distinctes pour ces deux groupes.

Le contenu de ce mince rapport

 En ce qui concerne les « minorités visibles », 6 thèmes sont abordés. Le premier concerne la police, par rapport à laquelle, il y aurait principalement deux « irritants », le profilage racial et la violence lors des interpellations. Les solutions préconisées sont de mettre fin aux interpellations aléatoires et d’instaurer des patrouilles mixtes avec des intervenant.es sociaux, de même que de sensibiliser les membres des corps policiers par le biais d’une formation sur le racisme. Le deuxième concerne l’accès au logement, où il n’y a pas de diagnostic de situation, simplement un rappel pour souligner que la discrimination est interdite par la Charte et qu’il est également possible de s’adresser au Tribunal administratif du logement. Les solutions sont donc de renforcer les mécanismes de plainte déjà existant et d’informer locataires et propriétaires de leurs droits et obligations. Le troisième thème est l’accès à l’emploi, par rapport auquel le principal problème semble être les ordres professionnels. Les solutions préconisées sont de rendre les emplois de la construction plus accessibles et de les valoriser auprès des « minorités visibles »; de rendre plus transparent et plus ouvert, d’ici 5ans, le processus de reconnaissance des diplômes acquis à l’étranger par les ordres professionnels; d’augmenter d’ici 5 ans la présence des « minorités visibles » dans le secteur public et de nommer une personne appartenant à ces « minorités visibles » sur le CA des sociétés d’État, là encore dans un dé;ai de 5 ans. Le quatrième thème est l’information de la population, ce qui passera par une campagne publique de sensibilisation. Le cinquième thème est l’éducation des jeunes pour lesquels on préconise d’intégrer la sensibilisation au racisme principalement par le biais du cours d’ECR et de mieux former les enseignant.es sur le sujet. Le dernier thème est l’exemplarité du gouvernement. Pour y parvenir, il est question de nommer un.e ministre responsable de la lutte au racisme et de former les employé.es du secteur public aux enjeux du racisme.

Pour ce qui a trait aux Autochtones, le rapport insiste fortement sur les sommes importantes que le gouvernement du Québec planifie d’investir pour améliorer la situation des Autochtones, mentionne qu’il est important de mieux connaître l’histoire, la culture et la situation des Autochtones et qu’il faut s’atteler à la sécurisation culturelle des Autochtones dans les services publics. On devrait pouvoir y parvenir par le biais d’une campagne de sensibilisation, d’un cours sur les Autochtones dans la formation initiale des enseignant.es, en modifiant le contenu des manuels scolaires, en formant les employé.es de l’État et en mettant fin à l’interdiction des langues autochtones dans les services publics. Trois thèmes sont abordés plus spécifiquement. D’abord, la police, où, comme pour les « minorités visibles » on prône l’arrêt des interpellations aléatoires et la création de patrouilles mixtes. Ensuite, l’accès à la justice, pour laquelle on préconise une aide financière aux organismes communautaires autochtones et des services d’interprétation judiciaire en langues autochtones. Enfin, les conditions de logements que l’on compte améliorer en augmentant les ressources pour le logement hors réserve.

Quelques éléments de critique

    • Le rapport serait basé sur une consultation avec 51 organismes, sans préciser lesquels.
    • Aucune reconnaissance de l’existence du racisme systémique, d’où le recours à des mesures d’éducation, sans préciser le contenu et les modes de dispensation.
    • La notion de « minorité visible » n’est jamais définie.
    • La plupart des constats reposent sur des données lacunaires (ainsi, en emploi, un problème majeur semble être la reconnaissance des diplômes étrangers alors qu’on peut supposer qu’une bonne partie des personnes appartenant à ces « minorités visibles » est née ou a fait ses études au Québec).
    • Les programmes d’accès à l’égalité en emploi existent depuis plusieurs années au Québec; aucune analyse n’est faite pour expliquer leur échec à intégrer les « minorités visibles » dans le secteur public et parapublic.
    • Il n’y a pas d’objectifs mesurables et les délais d’application des mesures sont souvent de 5 ans.
    • Pas de budgets additionnels.
    • Un ministre responsable mais aucune structure administrative de coordination.

Cette tribune permet d’aborder des sujets d’actualité qui sont en lien avec les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels au Québec, au Canada ou ailleurs dans le monde. Les carnets sont rédigés par des militant-e-s des droits humains et n’engagent que leurs auteurs et autrices.